Comprendre le taux d’intérêt légal : un indicateur clé pour vos CGV et la gestion des pénalités de retard
En apparence technique et réservé aux juristes, le taux d’intérêt légal est pourtant une référence incontournable dans la vie des entreprises. Il fixe le cadre minimal des pénalités de retard que les professionnels peuvent appliquer en cas de facture impayée. Il s’impose aussi dans certaines situations judiciaires, notamment lors de l’exécution d’un jugement.
Depuis plusieurs années, son mode de calcul et ses modalités d’actualisation ont profondément évolué. Aujourd’hui, il est révisé deux fois par an et distingue les créances dues aux particuliers et celles entre professionnels. Dans un contexte où la trésorerie est un enjeu vital, bien comprendre ce taux, son histoire, ses variations et ses implications pratiques devient essentiel, tant pour rester en conformité que pour optimiser la gestion financière.
Un outil juridique au service de l’équilibre économique
Le taux d’intérêt légal est un instrument fixé par les pouvoirs publics. Son objectif premier est double :
- Sanctionner les retards de paiement, en imposant un coût au débiteur qui ne règle pas à l’échéance.
- Protéger les créanciers, en leur garantissant une compensation financière en cas de non-respect des délais contractuels ou légaux.
Il est applicable dans deux grands cas :
- En matière judiciaire : lorsqu’un juge ordonne un remboursement ou le règlement d’une somme, le taux d’intérêt légal s’applique dès la date prévue, et peut même être majoré en cas de non-paiement après un certain délai.
- En matière commerciale : il sert de base au calcul du taux minimal des pénalités de retard à mentionner dans les Conditions Générales de Vente (CGV).
Ce taux constitue donc une référence nationale, indépendante des conditions de marché, et assure un socle commun de calcul pour toutes les situations où un paiement n’est pas effectué dans les délais.
Une évolution notable : deux taux distincts depuis 2015
Jusqu’en 2014, il n’existait qu’un seul taux d’intérêt légal applicable à toutes les situations. Cette uniformité ne reflétait pas les réalités économiques : les particuliers et les entreprises ne présentent pas le même profil de risque ni la même capacité de négociation.
Depuis 2015, deux taux sont publiés à chaque semestre :
- Un taux pour les créances des particuliers : il s’applique notamment lorsqu’un consommateur est créancier d’une entreprise ou d’une administration.
- Un taux pour les créances entre professionnels : il concerne toutes les relations B2B et sert de base au calcul des pénalités de retard mentionnées dans les CGV.
Cette distinction a permis de rapprocher davantage le taux applicable aux entreprises de la réalité économique et des taux du marché interbancaire, tout en conservant pour les particuliers un niveau plus protecteur.
Le taux d’intérêt légal au second semestre 2025
Au 1er juillet 2025, une nouvelle révision est entrée en vigueur. Elle fixe :
- 6,65 % pour les créances dues aux particuliers.
- 2,76 % pour les créances entre professionnels.
Ces valeurs sont en net recul par rapport au premier semestre 2025, où elles atteignaient respectivement 7,21 % et 3,71 %. Cette baisse reflète l’évolution des conditions économiques et financières, marquées par un ralentissement de l’inflation et un ajustement des taux directeurs.
Pour les entreprises, cette révision signifie que le taux minimal des pénalités de retard à inscrire dans les CGV et sur les factures passe à 8,28 % (trois fois le taux légal applicable aux professionnels). Toute mention d’un taux inférieur serait non conforme.
Historique des variations récentes
L’histoire récente du taux d’intérêt légal est marquée par de fortes fluctuations :
- Années 2008-2010 : on observe une tendance à la baisse, avec un taux unique qui passe de 3,99 % en 2008 à 0,65 % en 2010.
- Période 2015-2020 : l’instauration de deux taux entraîne un différentiel constant entre particuliers et professionnels. Les taux restent globalement faibles, souvent inférieurs à 1 % pour les entreprises, dans un contexte de taux d’intérêt historiquement bas.
- Années 2022-2024 : forte remontée liée au resserrement monétaire et à la hausse de l’inflation. Le taux professionnel passe de 0,76 % début 2022 à plus de 5 % en 2024.
- 2025 : amorce d’une baisse progressive, traduisant un retour à des conditions financières plus modérées.
Ces évolutions montrent l’importance d’une veille régulière : une entreprise qui ne met pas à jour ses taux de pénalité risque d’appliquer un pourcentage obsolète, avec des conséquences juridiques potentielles.

Les pénalités de retard : une obligation dans les CGV
En matière commerciale, la loi impose à tout professionnel de mentionner dans ses CGV et sur ses factures :
- Le taux applicable pour les pénalités de retard.
- Les conditions de leur application.
- Le montant de l’indemnité forfaitaire de recouvrement (actuellement fixée à 40 €).
Le taux de pénalité ne peut être inférieur à :
- Trois fois le taux d’intérêt légal applicable aux professionnels.
- Ou au taux de refinancement de la Banque centrale européenne majoré de 10 points, si ce montant est supérieur.
Ainsi, au second semestre 2025, avec un taux légal professionnel de 2,76 %, le seuil minimal se situe à 8,28 %. Toute entreprise mentionnant un taux plus bas s’expose à une non-conformité.
Calcul et application des pénalités
Les pénalités de retard sont dues dès le lendemain de la date d’échéance inscrite sur la facture, sans qu’il soit nécessaire d’envoyer un rappel ou une mise en demeure. Elles se calculent sur le montant TTC de la facture impayée, selon la formule :
Pénalité = (Montant TTC × Taux de pénalité × Nombre de jours de retard) ÷ 365
Exemple :
Une facture de 10 000 €, émise le 1er août 2025 avec échéance au 31 août 2025, est réglée le 30 octobre 2025, soit 60 jours de retard.
- Taux de pénalité (CGV) : 8,28 %.
- Pénalité = (10 000 × 8,28 % × 60) ÷ 365 ≈ 136,16 €.
Ces sommes sont exigibles de plein droit et peuvent être ajoutées au montant principal dû.
Le rôle du taux d’intérêt légal en matière judiciaire
En dehors des relations commerciales, le taux d’intérêt légal joue aussi un rôle important dans les litiges civils ou administratifs. Lorsqu’une décision de justice condamne une partie à payer une somme, ce taux s’applique à compter de la date fixée par le jugement.
Si le débiteur tarde à exécuter la décision, un taux majoré entre en jeu, correspondant au taux légal simple augmenté de 5 points. Cette majoration vise à inciter au règlement rapide et à éviter que la partie condamnée ne profite de délais supplémentaires sans contrepartie financière.
Intégrer la veille sur le taux légal dans la gestion d’entreprise
Pour une entreprise, suivre l’évolution du taux d’intérêt légal est loin d’être une formalité administrative. C’est un levier de :
- Conformité réglementaire : éviter toute contestation sur la légalité des taux appliqués.
- Optimisation de trésorerie : encourager les clients à respecter les délais de paiement.
- Transparence commerciale : renforcer la confiance en affichant des CGV à jour.
Mettre en place un rappel semestriel pour vérifier les taux publiés et mettre à jour les documents contractuels est une bonne pratique, souvent confiée au service administratif ou à l’expert-comptable.
Un indicateur à surveiller dans un contexte économique changeant
Les prochaines années pourraient encore voir des ajustements importants, selon l’évolution des taux directeurs et de l’inflation. Une remontée rapide pourrait accroître significativement le montant des pénalités, tandis qu’une nouvelle baisse allègerait la charge pour les débiteurs mais réduirait l’effet incitatif pour un paiement à l’échéance.
Pour les dirigeants et responsables financiers, anticiper ces mouvements est crucial. Ils doivent s’assurer que leurs systèmes de facturation intègrent automatiquement les bons taux et que leurs équipes commerciales connaissent les règles de calcul.
Le taux d’intérêt légal, souvent perçu comme une donnée technique, est en réalité un pilier de la relation contractuelle et de la gestion financière. Sa révision semestrielle et la distinction entre particuliers et professionnels imposent une vigilance constante.
Au second semestre 2025, avec un taux professionnel de 2,76 %, le minimum légal des pénalités de retard est fixé à 8,28 %. Mentionner ce taux à jour dans les CGV n’est pas seulement une obligation légale : c’est aussi un outil de pilotage de la trésorerie et un signal clair envoyé à vos partenaires commerciaux.
En somme, comprendre et maîtriser cet indicateur, c’est se donner les moyens d’une gestion saine, conforme et proactive.
Apprenez à interpréter bilan, compte de résultat et SIG pour prendre de meilleures décisions.
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